29 octobre 2001

Analyse de la draft 2009: Les Trailblazers de Portland (suite)

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[suite de la première partie]

---Victor Claver ( voir profil mock draft 26th pick, Chicago) a du potentiel à ne plus savoir qu’en faire et, indépendamment des considérations en rapport à l’effectif actuel des Blazers, son profil de combo forward de grande taille (2,09 m), athlétique, capable d’allumer de loin et doté d’une certaine académie de jeu est aussi séduisant que les premières notes d’un vieux morceaux de jazz. Or, avant même la draft, l’espagnol avait prévu de rester encore un peu à Valence, bonne équipe de l’excellent championnat ibérique où il joue déjà un vrai rôle. Ainsi, les questions du paragraphe précédent ont été vite réglées. Avec sa sélection, Portland n’aura pas à rencontrer de problématiques d’effectif ou de talent à développer et la franchise pourra le sortir de son chapeau à l’avenir, dans cette période incertaine dont nul ne connait la teneur. Comme un vieil inspecteur de police en butte avec la pègre qui planque une arme à sa cheville, les Blazers gardent une carte dans la manche. Un pick peu encombrant et pas balancé à la flotte pour autant.

---Ainsi et au regard de ce qui vient d’être énoncé, la sélection de Claver trouve un intérêt stratégique. La suite des évènements présentent aussi une certaine logique puisque ce sont deux modestes mais très sérieux power forwards qui ont été sélectionné en début de second tour et qui devraient faire de parfaits role players de soutien à ce poste 4 actuellement sans profondeur et qui attend un gros renfort. Deux joueurs à la fois sans prétention pour éviter les problèmes de partage de temps de jeu (réservé à Aldridge, au gros renfort qui aurait dû être signé et même à Travis Outlaw en cas de small ball) et susceptibles d’apporter quelques coups de main bienvenues si besoin.

---Mais la question que je me pose est : est-ce que Portland a sélectionné deux ailiers forts « bouche-trous » (sans être péjoratif) pour les mettre en concurrence ? Cela n’est pas dénué de sens. Chaque rookie amène avec lui une grande dose d’incertitude et quelque soit le niveau qu’on lui connaît, il n’est jamais évident de savoir quel sera son rendement réel dans la grande ligue. Ainsi, même si une franchise est à la recherche d’un seul et simple role player, elle n’a aucune garantie quand à la capacité de ce rookie à remplir correctement le rôle qui lui sera attribué, aussi restreint celui-ci soit-il. Prendre deux joueurs pour une seule place limite les risques d’échec et devrait permettre au bout du compte de faire un choix sur du concret (rendement en NBA, alchimie avec l’équipe des Blazers,…). Portland a lâché deux choix du début du second tour pour pouvoir faire cela mais avec un effectif aussi bondé et talentueux que le sien (et auquel il faut ajouter les cibles de recrutement au poste 1 et 4), c’est un luxe que la franchise peut se permettre. Actuellement, Portland se doit d’avancer ses pions avec une précision chirurgicale pour ne pas risquer de mettre en péril tout l’admirable travail qu’elle a effectué jusqu’à présent, et c’est ce qu’elle semble faire.

---Le premier de ces deux joueurs sélectionnés est Jeff Pendergraph (sa première place du second tour est certainement trop élevée pour un joueur aussi peu référencé mais je soupçonne l’acquisition de ce choix auprès de Sacramento d’avoir pour principal objet d’expédier Sergio Rodriguez loin de leur roster). L’ancien coéquipier de James Harden à Arizona State (2,06 m, 22 ans) se coule parfaitement dans le prototype du role player intérieur. Solidement doté physiquement, travailleur voire besogneux et énergique, il fait ce qu’il a à faire proprement sans chercher à en faire plus que ce qu’il peut. Conscient de ses limites et bon finisseur (avec même une certaine capacité à jouer dos au panier), il peut constituer un point de chute très efficace à proximité du panier s’il est bien servi (14,5 pts à 66 %). Son bon état d’esprit et son intelligence finissent de le dessiner comme un solide joueur de rotation même s’il ne faudra pas attendre plus de lui. Mais c’est le genre de col bleu que Portland a besoin sur son banc, non ?

---Dante Cunningham (Villanova, 22 ans) s’exprime d’une manière un peu différente mais il pourrait s’avérer tout aussi utile à son nouveau foyer. Il est un peu sous-dimensionné pour un poste 4 (2,03 m avec de bonnes chaussures et des qualités athlétiques à peines correctes) et n’a explosé sur la scène NCAA que lors de son année senior (16,1 pts à 52,5 % et 7,5 rbs), néanmoins, il pourrait trouver une place intéressante de « spot-up shooteur intérieur » dans la ligue américaine. En effet, ce power dispose d’un shoot à mi-distance d’une grande précision qui est admirablement servi par un excellent jeu sans ballon. On comprend rapidement l’intérêt pour Portland d’avoir un tel joueur sous la main : entre l’altruisme et l’intelligence intrinsèques des Blazers, la faculté de débordements d’énergumènes comme Brandon Roy, Andre Miller ou Jerryd Bayless et le point de fixation que pourrait éventuellement constituer Greg Oden sous le panier, cette capacité à faire frémir le filet à mi-distance devrait trouver des espaces pour se faire entendre et soulager les autres scoreurs de l’équipe de quelques points.

---D’ailleurs, on se rend compte que Pendergraph et Cunningham partagent cette efficacité à la finition et ce bon jeu sans ballon, à la différence que le premier s’attend à recevoir la balle un peu plus près du panier que le second. Tous les deux modestes mais vaillants et intelligents, efficace dans leur registre et inscrits dans le travail d’équipe, ils sont deux joueurs finalement assez semblables dans le rôle qu’ils auront à jouer en NBA et à Portland.

---La description de ces deux profils, à la fois calibrés pour un rôle identique et différents sur quelques caractéristiques saillantes (au niveau du physique et de la zone d’intervention offensif), ainsi que la densité de l’effectif rossonero donnent un certain poids à l’idée d’une mise en concurrence de ces deux joueurs pour un seul strapontin. Lequel des deux sera le plus productif, correspondra le mieux au jeu des Blazz et gagnera le spot mis aux enchères par la franchise, autant de questions qui auront la tâche de trouver leurs réponses sur le terrain.

---La sélection de ces deux role players n’est pas inintéressante, toutefois et au risque d’éveiller des impressions de déjà entendu, je regrette que Portland ne se soit pas jeté sur DeJuan Blair (profil voir mock draft 15th pick, Detroit) alors qu’il était disponible lors de chacun de leurs trois premiers choix de draft. Je peux comprendre que la franchise n’ait pas voulu mettre un joueur de la valeur de Blair dans les pattes du power qu’elle espérait faire venir (sachant que le duo Aldridge-Blair avait de quoi dissuader pas mal de recrue potentielle) mais d’une part, Portland n’avait aucune garantie quand à la venue d’un des free agents visés (contrairement à un joueur qui est drafté) et d’autre part, je me demande s’il ne valait pas mieux remplir le trou au poste 4 derrière Aldridge en engageant un rookie de la qualité du Pitt’s Bull plutôt qu’en faisant venir un David Lee ou un Paul Millsap à 10 millions de dollars l’année.

---On peut aussi se dire qu’il y avait d’autres joueurs bien plus forts que Pendergraph ou Cunningham (Chase Budinger, Sam Young,…) que la Cité des Roses aurait pu drafter mais comme je le dis depuis plusieurs lignes, les plans Blazers avaient en tête un effectif plein comme un œuf et ça fait longtemps que la franchise a dépassé le stade de l’accumulation de talents. L’heure est désormais au calibrage de l’effectif et à l’ajout de petites touches précises.

---Le 55ème choix par contre, semble répondre à une toute autre logique que celle, calculatrice et prudente, qui a prévalu jusque-là : la logique du « une chance pareille, on calcule pas, on la prend ». En effet, qui aurait pu croire qu’un joueur qui était prévu en fin de premier tour/début du second et qui a sorti quelques feuilles de stats bien pralinées face à la team USA championne olympique, allait être encore sans franchise si loin dans la draft ? Même dans cette draft ô combien étrange, c’est peut-être le sort qui a été réservé à l’australien qui a le plus surpris les observateurs.

---Patrick Mills est trop talentueux et prometteur pour que les Blazers n’usent pas leur 55ème choix sur sa personne. Même si cette sélection contredit une grande partie la ligne directrice qui était censée être celle de la franchise (Portland n’a plus besoin d’empiler de talents supplémentaires et continuer dans cette voie pourrait être plus néfaste que positif), il faut admettre qu’il est difficile de critiquer des dirigeants qui profitent d’une telle opportunité.

---Et maintenant ? serait-on tenté de se demander. Mills est avant tout un scoreur sur pile électrique trop petit pour jouer arrière. A qui va-t-il prendre des minutes ? Jerryd Bayless, le troisième meneur de Portland est aussi jeune que lui, tout aussi explosif, inflammable et attiré par le panier mais il est beaucoup plus talentueux. La franchise a pas mal investi sur lui (sélectionné en 11ème position de la draft 2008 et obtenu après un échange) et compte sur son potentiel pour l’avenir, donc je ne vois pas dans quel interstice Patrick Mills pourrait se glisser.

---Dans un premier temps, j’ai pensé que l’australien allait faire un voyage initiatique de quelques petites années dans le monde professionnel, quelque part au-delà des frontières américaines (ce qui aurait certainement été très bon pour lui) afin de constituer une autre « carte dans la manche » des Blazers, à l’image de Victor Claver. Cependant, Portland lui a offert un contrat. Quel intérêt, si ce n’est celui d’avoir un quatrième meneur ? De plus, le jeu de Mills est loin d’être dépourvu de défauts (sélection de shoots suspecte, absence de playmaking) et je ne pense pas que cirer le banc l’aidera à les corriger. Quel intérêt dès lors d’avoir dans ses rangs un tel talent ?

---En fait, la signature de l’ancien leader de Saint Mary’s a peut-être un objectif, disons, plus stratégique pour la franchise de Portland. En effet, certains pensent que les Blazers ont signé leur 55ème choix de draft afin d’en faire une monnaie d’échange (enfin plutôt une pièce d’appoint dans le cadre d’un transfert impliquant d’autres joueurs, je pense). Ça se tient, mais sachant que 54 équipes sont passées devant lui sans le drafter et que le garçon s’est durement blessé avant même les summer leagues, ce n’est pas dit que le rookie fasse vraiment pencher la balance d’un trade (à moins peut-être qu’un GM ne se repasse les videos de ses performances face à la Team USA). Bref, le dossier Mills est encore en suspens.

---Au final, on serait tenté de penser que Portland aurait pu faire mieux du fait des possibilités qui s’offraient elle pendant cette draft. Cependant, les dirigeants ont fait preuve d’une certaine sagesse en pensant en fonction de leur effectif bodybuildé plutôt qu’en essayant de prendre le meilleur joueur disponible à chacun de leurs quatre choix. En ce qui me concerne, je pointerais plutôt un sourcil froncé sur l’idée de recruter un joueur comme Paul Millsap ou David Lee pour en faire un back-up à Aldridge (trop cher et sûrement trop bon). Rien ne m’étonnerait moins que ce soit de là que découle la non sélection de DeJuan Blair, laquelle sélection aurait rendu la draft des Blazers beaucoup plus spectaculaire et alimenté de quelques lignes la saga qui courent depuis peu dans l'Oregon.

StillBallin

4 commentaires:

Lucas a dit…

C'est vrai qu'avec 4 picks, Portland aurait pu tenter le pari DeJuan Blair, sans grand risque. L'absence d'un back-up de qualité à Aldrige aurait du les pousser à le sélectionner.
Je suis d'accord avec toi quand tu dis que Portland accumule les joueurs de talent. Cela finira-t-il par jouer contre eux? En tous cas je trouve dommage qu'un Jerryd Bayless ne puisse pas avoir plus de temps de jeu, que Dré Miller soit remplaçant -même si son début de saison ne joue pas en sa faveur- ou qu'un Nicolas Batum soit sous-utilisé en attaque.
Nate McMillan doit vraiment avoir de la poigne pour qu'aucun joueur ne pète son cable. Des joueurs talentueux qui ne peuvent s'exprimer mais qui se la ferment, ça en dit long sur le boulot du coach.
Cela dit, avoir un effectif aussi riche est bien évidemment un atout. La rotation des Blazers est des plus alléchantes.
Iront-ils loin en playoffs pour autant? Si McMillan n'utilise pas davantage Miller, j'en doute. Je fais davantage confiance à une équipe comme les Nuggets avec un Billups aux manettes.
Pour équilibrer l'effectif -moins d'arrières mais un back-up de qualité pour Aldrige- je penserais à un trade avec Chicago, genre Bayless-Thomas. Ca m'étonnerait fort que Bayless soit contre. A voir si une opportunité du genre se présentera, mais McMillan semble être satisfait de son effectif. Qui ne le serait pas?

StillBallin a dit…

Nate McMillan semble en effet faire un bon boulot, même si son travail commence à se fissurer un peu, notamment avec Andre Miller qui a publiquement dénoncé le fait d'être remplaçant. Cette relativement bonne gestion des hommes se fait aussi par le fait que les Blazers se sont attachés à sélectionner des joueurs avec des personnalités adéquates (peu de grande gueule, d'égo surdimensionné).

Comme tu dis, le fait que l'effectif soit un peu chargé peut être tourner en avantage (surtout avec 82 matchs de saison régulière). Comme le font les grosses écuries européennes ou Orlando et Chicago, cette année, Portland fait jouer beaucoup de monde mais presque personne plus de 30 minutes (pour l'instant Brandon Roy joue presque 10 minutes de plus que le second plus gros temps de jeu, LaMarcus Aldridge). Cela pourrait être payant au fil de la saison (gestion de la fatigue + tous les joueurs sont impliqués, ce qui permet de supporter des pannes ou des blessures).

Mais je m'inquiète plus pour leur défense et leur sélection de tirs. Je n'ai vu aucun de leur match cette saison et ce que je dis se base sur mes souvenirs de compte-rendus mais il me semble que c'est notamment ça qui est en cause pour leur début poussif (2 victoires et 2 défaites).

Pour ce qui est des transferts, je pense que Portland a ce genre de préoccupations en tête depuis un bon moment. Donc effectivement, ça ne serait pas étonnant qu'on en voit un ce conclure au cours de la saison (même si les dirigeants essuient échecs sur échecs dans ce domaine depuis le début de l'été). D'ailleurs, comme je le disais, la signature de Pat Mills semble aller dans ce sens. Parmi les joueurs visés, je pense que Travis Outlaw voire Martell Webster (même si il est chaud actuellement... ce qui justement pourrait permettre un bon trade) font de bons candidats. Bayless aussi mais je pense que les Blazz ne le lâcheront qu'en échange d'une belle et savoureuse contre partie.

J'aime bien l'idée de faire venir Tyrus Thomas à Portland (parfait pour comme doublure pour Aldridge) mais je crains que le fait que son contrat arrive à échéance freine l'une voire les deux franchises. En effet, Chicago doit penser à mettre de l'argent de côté pour resigner ses contrats rookies (Jo Noah et surtout Derrick Rose) et ils ne voudront pas récupéré un contrat non finissant en contre partie. Portland aussi doit faire attention à ses sous et Thomas se voit comme un titulaire et rien ne m'étonnerait moins que de le voir demander plus de temps de jeu et surtout un contrat de titulaire. Donc pour Portland, ce transfert serait presque un échange sans contrepartie.

On verra bien ce que nous réserve cette franchise.

Lucas a dit…

Concernant la défense, je ne les ai pas encore vu jouer non plus, mais je pense que l'absence de Batum est plus gênante qu'elle ne peut paraître.
En effet, à chaque fois qu'ils ont perdu, l'option offensive numéro 1 des adversaires a fait un carton.
Carmelo : 41 points
Ariza : 33 points à 11/17 et 5/8 à 3 points
Nul doute que le fait de leur mettre un défenseur comme Batum dans les pattes dès le début de match éviterait à ces joueurs d'être chauds d'entrée, voire même de les faire douter -plus pour Ariza que pour Melo. En tous cas je pense que c'est davantage dans cette optique que McMillan lui faisait débuter les matches l'an dernier.
Pour les Bulls, il me semble que Noah a déjà été prolongé, mais j'ignorais qu'il restait si peu de contrat à Thomas. Aucun autre ailier-fort back-up qui pourrait être tradé vers l'Oregon ne me vient à l'esprit pour le moment. Je vais y réfléchir ;)

StillBallin a dit…

C'est ce que je me suis dit aussi pour Batum mais j'ai du mal à croire qu'il ait pu avoir une telle influence les matchs. Je me demande aussi si il n'y aurait pas une sorte de relâchement par rapport à l'année dernière (parce qu'un peu trop confiant et sûr de leur force?). Mais ton idée de Batum qui met un coup de pression défensif en début de match est aussi plutôt pertinente. Sans doute que les prochaines semaines nous permettront d'y voir un peu plus clair.

Pour le power remplaçant, il sera peut-être intéressant d'attendre la draft car beaucoup d'ailiers forts intéressants pourraient bien s'y présenter. Sinon, j'aurais bien vu un vieux briscard besogneux un peu dans le style de Reggie Evans ou un guerrier qui joue toujours à 200 à l'heure comme Ronny Turiaf.