[suite de la première partie]
---Alors, les Hawks ont-ils eu raison de poser leur carte sur ce talent insaisissable ? Et bien on pourrait penser que oui. Les deux postes qui étaient à pourvoir à l’occasion de la draft étaient celui de pivot (sans propriétaire depuis presque 10 ans) et de meneur (où Mike Bibby ne pourra bientôt plus suivre Josh Smith, Al Horford et Marvin Williams). Les pivots ayant désertée la session 2009 de la draft (il restait bien BJ Mullens mais il fallait oser), les Hawks ont logiquement décidé de piocher dans ce florilège inédit de meneurs de qualité.
---Jeff Teague est assurément le plus doué des point guards restants mais il est aussi le moins bon playmaker. Toutefois, Atlanta est une équipe de duel, plus portée par le un contre un que par une vraie circulation de balle. Or, c’est bien sur ce genre d’action à base individuelle que l’ancien Demon Deacon est le plus démoniaque. Sa capacité hors norme à se créer son shoot sans aucune aide extérieure et surtout, sa faculté à les rentrer (pour rappel : 18,8 pts à 48,5 % dont 44,1 % à trois points) devrait lui permettre de se couler avec perfection dans le jeu hawk et d’y exprimer tout son talent. C’est d’ailleurs de cette manière que Flip Murray s’était imposé dans la rotation d’Atlanta la saison passée jusqu’à en devenir le facteur X et qu’il a au passage réalisé la meilleure saison de sa carrière (12,2 pts en 24,7 minutes par match). Ce dernier n’étant plus un Hawk dorénavant, Teague pourra se glisser dans ce costume sans problème.
---De même, tant que Bibby est là (il a finalement prolongé son bail en Georgie), les Hawks n’ont pas besoin de se préoccuper des compétences de playmaker de leur nouveau rookie. Cela n’aurait pas fait de mal mais cela n’aurait pas été suffisamment utile pour y sacrifier le talent de Teague, ont dû penser les dirigeants d’Atlanta. La franchise a peut-être pris un petit risque en draftant l’arrière mitraillette car la prolongation de Bibby n’était pas encore effective. Toutefois, on peut supposer que les pourparlers étaient suffisamment en bonne voie pour donner les certitudes nécessaires aux décideurs des Hawks.
---Il y a de quoi avoir une certaine satisfaction à avoir mis la main sur un joueur aussi talentueux que Teague avec un 19ème choix et d’être en mesure de ne pas trop ressentir les particularités négatives qu’il présente et qui ont fait que les dix-huit équipes précédentes ont préféré marquer un autre nom que le sien sur leur feuille de draft. Et pourtant, un souci est sorti des fourrés pour venir se mettre en travers de la pertinence de cette sélection.
---En effet, quelques heures avant la draft, Atlanta avait envoyé Craig Claxton et Acie Law (un pilier d’infirmerie et un ramasseur de serviettes) à Golden State contre Jamal Crawford. Or, Crawford est la copie conforme de Jeff Teague. Sauf que lui est déjà confirmé (19,7 pts de moyenne l’année dernière à cheval entre Oakland et New York). La ville d’Atlanta est-elle assez grande pour deux joueurs rigoureusement identiques, à la fois formidables et crispants, entre Joe Johnson et Mike Bibby ?
---Donner une réponse entièrement positive à cette question me paraît difficile. Flip Murray a laissé une place de pétard ambulant sur le banc en partant mais ce fauteuil apparaît diablement étroit pour occuper simultanément Crawford et Teague. De plus, aussi fabuleux soit-ils lorsqu’il est question de scorer, tous deux ont tendance à prendre de mauvais shoots, de mauvaises décisions et à couper les actions de jeu. Un joueur de ce genre peut donner une touche de folie salutaire à une équipe, mais deux comme ça pourraient envoyer leur formation au tapie encore plus vite que ne l’aurait fait l’adversaire. Et enfin, tous deux demandent et utilisent énormément de ballons (sans les rendre souvent). L’unique boule de cuir qui est utilisé pendant le match devrait se révéler bien seul face à cette équipe des Hawks qui doit aussi nourrir pleinement Joe Johnson, Mike Bibby, Josh Smith et Marvin Williams. Lourd fardeau que celui de ce ballon.
---Le transfert de Jamal Crawford étant survenu avant la draft, les Hawks étaient pleinement conscient des conséquences potentielles de la sélection de Teague. Je veux bien admettre que passer à côté d’un joueur du talent Jeff Teague avec un 19ème choix et difficile, que ce dernier est beaucoup plus jeune et pourquoi pas peut-être potentiellement meilleur que Crawford mais comment les deux combo guard vont-ils pouvoir cohabiter dans l’étroite fenêtre d’action que laisseront les anciens de l’équipe ? Si l’ancien leader de Wake Forest se fait écraser par la concurrence, sa sélection aura été inutile, quelque soit le talent qu’il possède.
---Par conséquent, n’aurait-il pas été plus judicieux de sélectionner un vrai meneur ? Eric Maynor faisait un excellent candidat. Capable d’avoir un impact individuel mais aussi collectif, Maynor représente un intéressant compromis entre le type de joueur qui pourrait s’insérer dans le jeu d’Atlanta et celui qui pourrait renforcer un secteur un peu déficient (playmaking, gestion de l’équipe). Cela aurait été le choix de la logique d’équipe immédiate mais je reconnais que miser sur le talent comme c’est le cas avec Teague peut-être plus lucratif. En effet, selon comment se passeront les choses, on peut imaginer qu’un jour Jeff Teague ou Jamal Crawford soit échangé contre un joueur au profil aussi intéressant que celui de Maynor mais de plus grande valeur.
---Ainsi, il est difficile d’approuver totalement la sélection de Teague à cause de l’arrivée préalable de Jamal Crawford mais il est aussi très compliqué de la remettre en cause. Cette opération peut bien tourner comme elle peut aboutir à un gâchis. D’un autre côté, le nouveau rookie des Hawks pourrait lui-même donner une solution parfaite aux problèmes de ses dirigeants : en acquérant quelques compétences en matière de playmaking. Oui, je sais aussi facile à dire que difficile à réaliser, mais le jeune scoreur épileptique a au moins un an devant lui pour afficher quelques progrès encourageants dans cette voie et donner quelques pistes quand aux choix que sa franchise devra effectuer à l’avenir. Malgré tout, je déconseillerais de prendre des paris sur un tel dénouement.
---Les Hawks auraient-ils réalisé une bonne pioche un peu plus tard dans la soirée en sélectionnant Sergiy Gladyr (1,96m, presque 20 ans) avec leur choix de seconde partie du deuxième tour ? L’arrière ukrainien souffre d’un certain anonymat, en grande partie parce qu’il évoluait encore dans son championnat national la saison passée, au MBC Mykolaiv -club sans vraie portée européenne- mais certains estiment qu’il est l’arrière shooteur à la technique offensive la plus aboutie de la draft, derrière James Harden.
---Doté d’un shoot très soyeux comme arme principale, bon manieur de ballon et assez athlétique, il affichait d’excellentes statistiques lors du dernier exercice : 15,4 pts à 45,2 % (36,4 % à 3). Evidemment la relative faiblesse de la ligue ukrainienne et de son équipe nuance ces chiffres mais dès l’année prochaine, Gladyr foulera les féroces parquets du championnat espagnol sous les couleurs de Manresa, et on devrait pouvoir avoir une indication beaucoup plus fiable de sa valeur. De plus, il n’y a pas grand-chose de mieux que de faire ses armes dans liga « no mercy » ACB, accessoirement meilleur championnat européen, pour donner la preuve de son niveau, s’aguerrir et devenir plus fort. Il pourra aussi en profiter pour corriger ses problèmes de prises de décision et de protection de balle.
---Avec ce 49ème choix, Atlanta a peut-être fait une bonne opération même si la franchise ne pourra en toucher les dividendes qu’un peu plus tard. A ce stade de la draft, le risque pris n’est pas très grand et même sans aucune mesure avec ce que ce choix pourrait rapporter. Il faudra quand même attendre de le voir passer au révélateur espagnol avant de le juger mais c’est toujours intéressant d’avoir un joueur aussi prometteur que lui dans les tuyaux. Il est vrai que le poste 2 d’Atlanta est bondé mais il en sera peut-être pas toujours ainsi lorsque l’heure sera venue pour Gladyr de franchir l’Atlantique et puis on peut toujours tirer un certain bénéfice de l’abondance de biens (trades, concurrence,…). De toute façon, avec un pick aussi profond dans le second tour, il n’est plus question de réfléchir en fonction de l’équipe mais plutôt de prendre le joueur qui possède le plus de valeur (niveau de jeu effectif + potentiel) aux yeux de la franchise, quelque soit son profil.
StillBallin
3 commentaires:
J'adore tes articles sur la draft. J'apprend beaucoup sur les joueurs.
Il ne manquerait pas le 18ème tour?
C'est parce que je regarde presque tous les jours avec impatience tes articles.
Je le kiffe Flip Murray ! Mais il reste à ATL non ?
Flip Murray est free agent pour l'instant et aucune prolongation à Atlanta ne semble être envisagée. D'ailleurs, les Nuggets sont intéressés (http://www.realgm.com/src_wiretap_archives/61659/20090918/nuggets_pursuing_flip_murray/).
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En fait, le 18ème choix, c'est Minnesota donc il est déjà fait.
...
Bon pour être tout à fait honnête, c'est Denver qui a récupéré ce choix et j'étais en train d'écrire l'article à ce sujet mais je l'ai fait sur un autre ordinateur qui a eu un problème et je n'arrive plus à récupérer l'article.
Tant qu'il n'est pas définitivement perdu je le laisse en suspens mais sinon, je le réécrirai. Ça m'ennuie un peu parce que je l'avais presque terminé (et puis j'y avais écrit le secret du sens de la vie que j'avais découvert et que j'ai oublié depuis).
A part ça, content de voir que mon travail t'intéresse à ce point.
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