
Rashard Lewis, Joe Johnson, Rudy Gay,  pas mal de monde tape sur les trop gros contrats de certains NBAers  comme causes de l'épineux lock-out qui nous tient les nerfs  actuellement. Mais parmi ces joueurs, tous ne sont pas surpayés sans  raison et ces décisions des franchises de leur proposer un salaire qui  surplante leur valeur réelle ne sont pas toutes marquées du sceau de  l'idiotie (même si des fois... enfin, bon).
En effet, poser un peu plus  de dollars sur la table que de rigueur est parfois la seule possibilité  pour des franchises moyennes, en développement ou peu attractives  d'attirer des free agents de fort calibre ou tout simplement de  conserver ses meilleurs joueurs. Parce qu'il faut bien l'admettre -et le  lock-out vient aussi de là-, face à la concurrence des gros marchés  bien aguicheurs comme New York, Los Angeles ou Chicago, la plupart n'ont  pas les armes pour rivaliser.
Tout le monde s'en prend à l'énorme contrat de Rashard Lewis mais sa venue à Orlando et son association avec Dwight Howard ont complètement changé le standing de la franchise floridienne.  Or, avec 22,4 points de moyenne sous le maillot de Seattle, Lewis était  un des plus gros free agents du marché et certainement un des plus  courtisés. Donc aligner le maximum de pognon était le moyen le plus sûr  pour le Magic de conquérir l'ailier au nez et à la barbe des autres  franchises qui l'avaient dans le viseur, et plus particulièrement de  celles qui étaient en meilleures positions (on a parlé de Houston qui  sortait d'une saison à plus de cinquante victoires alors qu'Orlando n'en  affichait que quarante).
Sans taillader dans la trésorerie comme ils  l'ont fait, les floridiens prenaient le risque de le voir signer  ailleurs et de faire une croix  sur cette association avec Howard qui  a si bien fonctionné par la suite. Sans ce contrat adipeux, le Magic  serait peut-être resté une équipe luttant pour les dernières places des  playoffs au lieu de la grosse cylindrée de l'Est qui a caressé des  espoirs de titre lors de ces dernières années. Après, est-ce que la  nouvelle dimension de la franchise valait toute cette débauche  d'argents? Ça, c'est une autre question. Mais on ne peut pas décemment  dire que ce volumineux contrat offert à Lewis n'était que la conséquence  fâcheuse d'une folie passagère de la franchise bleue ou de la gueule de  bois d'une soirée beaucoup trop arrosée. Ce surcoût dans le bail du  combo forward a en réalité été le prix à payer pour pouvoir ravir  l'ailier aux autres franchises intéressées.
C'est toutefois surtout pour tenter de conserver ses stars et plus  précisément les perles qu'elles ont draftées en haut de tableau trois ou  quatre ans avant que l'option "gros sous" devient extrêmement utile.  Ces talents qui ont été distribués aux équipes les plus faibles en  deviennent parfois les figures de proue, locomotive sur le terrain et  égérie en dehors où ils font office de véritable ancre médiatique  attirant l'attention et du public dans les salles et les boutiques du  club. Ce sont eux qui portent la marque de la franchise, qui font naître  un engouement autour d'elle et qui créent un lien avec les fans.  D'ailleurs, contrairement aux franchises charismatiques en elles-mêmes  comme les Knicks ou celles qui trônent dans les sommets de la ligue, ces  stars constituent le seul vecteur de popularité de ces équipes moins  bien loties. En perdant un tel joueur sans contrepartie, telle une franchise  perd plus qu'un excellent basketteur, elle perd une grande partie du  bénéfice sportif, médiatique et économique qu'elle a construit au fil  des dernières années.
C'est,  je pense, pour éviter de faire un tel pas en arrière que Memphis en est  venu l'été dernier à offrir un si gros contrat à son jeune et  emblématique leader Rudy Gay, un contrat certainement supérieur à  la véritable valeur de l'ailier (c'est à peu près le même que celui de  Kevin Durant). Les Grizzlies n'avaient alors pas encore montré de quel  bois ils se chauffaient mais ils commençaient déjà à s'extirper des  profondeurs collantes du classement et à gagner un degré de respect  qu'ils n'avaient pas souvent connus au cours de leur courte et difficile  histoire. Donc perdre Rudy Gay à ce moment-là aurait été un sérieux  coup de canif dans leur élan mettant à mal un projet sportif qui  commençait tout juste à aboutir à quelque chose d'intéressant, et un  gros camouflet pour les fans.
Le problème, c'est qu'il fallait convaincre l'intéressé de rester.  Et je ne brise aucun tabou en disant que porter le maillot des Grizzlies  n'a pas a autant de gueule que porter celui des Knicks, des Bulls ou  des Celtics tout comme être un célèbre basketteur à Memphis n'est pas  aussi excitant que l'être à New York, Chicago ou Miami. L'ailier aurait  aussi pu être tenter d'aller voir du côté d'une équipe plus compétitive  et bien mieux placée dans la course au titre. Qu'importe les progrès et  les promesses de la jeune franchise du Tennessee, ils n'auraient pas  fait le poids contre l'assurance d'aller en playoffs chaque année sans  être promis à une élimination répétée au premier tour.
Ainsi, Rudy Gay avait sous les yeux suffisamment de raison de  quitter Memphis pour que les Grizzlies s'en inquiètent et prennent peur  de perdre en même temps que lui tous les efforts des précédentes années  avant même de pouvoir en goûter les fruits. Face à cela, que  pouvaient-ils faire d'autre pour avoir une chance de le convaincre de  rester que de lui montrer à quel point ils tenaient à lui en alignant un  maximum de zéros sur son chèque?
Dans une situation semblable, Toronto n'avait  pas réussi à convaincre le premier choix de draft de son histoire et  très performant meneur, Damon Stoudamire (19 points, 8 passes  pendant deux et demi, il a été échangé à la mi-saison parce qu'il avait  refusé les propositions de prolongation de contrat des Raptors et  risquait de partir en free agent l'été venu) et avait pratiquement dû  repartir d'une feuille blanche avec leur nouveau super rookie, Vince  Carter. Ne pensez-vous pas qu'avec Stoudemire à la place du vaillant  mais faiblard Alvin Williams en meneur titulaire aux côtés du Human  Highlight Film de North Carolina (et du jeune Tracy McGrady), la  franchise canadienne aurait eu de meilleurs jours qu'elle en a eu tant  au niveau sportif que de son image? Il ne faut pas sous-estimer le  bienfait de capitaliser sur ses actions passées, particulièrement quand  il s'agit d'un franchise de petite ou moyenne envergure.
Encore  une fois et comme pour Rashard Lewis, il ne s'agit pas ici de dire que  Memphis a eu raison de dévaliser son propre coffre-fort pour Gay mais de  montrer qu'elle ne l'a pas surpayé sur un coup de tête ou pour le  simple plaisir de sortir de l'argent de la banque. Que ce surcoût était  en fait le prix qu'à dû payer une franchise modeste pour pouvoir garder  son joueur étendard. Après, est-ce que ça en valait le coup, ça chacun  peut se faire une opinion là-dessus.
D'ailleurs, le cas de Joe Johnson est un exemple de ce  qui "n'aurait pas valu le coup". Les Hawks voulaient eux aussi garder  leur leader emblématique et principal artisan de leur retour permanent  en playoffs, et en voyant arriver Chicago, New York et New Jersey, futur  Brooklyn, les poches pleines de billets verts et de promesses de gloire  livrées avec leur statut de gros marchés, ils se sont dit qu'il aller  falloir mettre le paquet pour convaincre l'arrière de rester en Géorgie.  Les Knicks notamment constituaient un concurrent très, très dangereux.  Ils avaient une faim rageuse de stars et une marge indécente sous le  salary cap qui leur permettait de dépenser des dollars à la pelle, comme  ils l'ont d'ailleurs montré avec Amare Stoudemire (Phoenix, en voilà un  exemple d'équipe qui a beaucoup perdu en refusant de proposer un  contrat surdosé à son ailier fort et qui le regrette peut-être  aujourd'hui). Non content d'être installé dans un marché super attractif  et charismatique, les Knicks avaient aussi la capacité d'offrir à  Johnson un très gros contrat. Cela bien fiché dans leur tête en même  temps que la volonté absolue de garder leur pièce maîtresse, les Hawks  en sont venus à se saigner aux quatre veines. 
Et ils ont atteint leur but. Pour leur plus grand malheur  certainement. Il est évident qu'en faisant une offre "correcte" à leur  arrière et en refusant de faire monter les enchères, ils auraient pris  le risque de le voir succomber aux appels des sirènes new yorkaises ou  chicagoanes. Et évidemment, son départ sans contrepartie pour un camp  ennemi auraient eu des conséquences difficiles à encaisser. Les fans  leur auraient soufflé dans les bronches pendant un bon moment, leur  potentiel économique aurait pris un petit coup dans l'aile et  sportivement, leur équipe aurait été indubitablement moins compétitive.
 
Mais tous ça n'étaient que des petits soucis comparé à ceux que  l'encombrant contrat de Johnson risque désormais de provoquer. Ce  contrat est en effet beaucoup trop volumineux en long et en large pour  un joueur de 29 ans (il touchera 25 millions lors de la dernière année  de son bail, en 2015; il aura alors 35 ans) qui ne fait pas partie des  dix meilleurs joueurs de la ligue, plus encore dans un effectif à la  masse salariale boursoufflée et dont les performances sportives stagnent  sérieusement. Le perdre aurait été un véritable pas en arrière mais le  signer à ce prix-là a été deux pas en avant dans un buisson de ronces.  Je n'arrête pas d'écrire dans cet article que la plupart des joueurs  majeurs ne sont pas surpayés sans raison, que le surcoût de certains  contrats était un mal nécessaire au maintien du franchise player dans  l'équipe. Mais là, tout ça n'en valait pas la chandelle.
Observez bien les Timberwolves de Minnesota,  ils rencontreront vraisemblablement le même dilemme prochainement avec  leur le seul rayon de soleil qui a percé l'éternelle grisaille dans leur  ciel et le seul motif de fierté et peut-être d'espoir qu'ils peuvent  chérir pour le moment, Kevin Love. A mes yeux, l'intérieur n'est  pas un joueur qui mérite le contrat d'un franchise player mais le perdre  en free agent serait un nouveau coup dur et un sacré mauvais message  envoyé aux fans et aux autres talentueux membres de l'effectif. Comment  voulait-vous convaincre tout le monde de se donner à fond pour un projet  collectif lorsque ceux qui en sont les pierres angulaires ne pensent  qu'à se barrer à la première occasion?
Réussir à conserver le All-Star, premier joueur à emmener les  couleurs de la franchise enneigée au match des étoiles depuis Kevin  Garnett, serait au contraire un message très fort, peut-être susceptible  de lancer une dynamique sans compter qu'il est aussi un véritable  personnage médiatique comme les Wolves n'en ont pas souvent connu. Mais  comment convaincre quelqu'un qui a toutes les raisons de quitter ce nid à  défaites et à quolibets de continuer de porter leur étendard? En lui  donnant plus d'argents que ne le voudront les autres franchises comme  Memphis l'a fait pour Rudy Gay, donc en lui donnant plus que ce qu'il  mériterait. Le feront-ils? Ne préféreront-ils pas faire un pas en  arrière dans leur développement plutôt que de le surpayer (sachant qu'il  y a Derrick Williams qui pousse derrière)? Ça sera la question qui  courra toute l'année sous la saison de la franchise du nord des  Etats-Unis.
StillBallin
2 commentaires:
Je pense que le but de ce lockout est d’éliminer ce besoin de surpayer pour des joueurs juste à cause des autres équipes qui peuvent aussi surpayer pour des joueurs. La ligue veut créer un system où les équipes n’ont même pas le choix de payer autant pour ces joueurs (Joe Johnson, Rudy Gay, Rashard Lewis).
Je pense que l’autre côté de la médaille est que la ligue veut aussi limiter la mobilité des joueurs pour qu’ils ne soient pas capables de changer d’équipe aussi facilement qu’aujourd’hui. Ce qui veut dire, que les joueurs risquent de perdre de salaire, sans gagner de la mobilité. Je pense aussi que le cas d’un joueur comme Kevin Love montre bien les problèmes du model actuel. Un tel joueur ne devrait jamais avoir un contrat de « franchise player », mais sans une telle offre il quittera l’équipe aussitôt que possible.
Je gagerais que les joueurs vont bientôt accepter une offre semblable à celle que la ligue offre maintenant. Malheureusement c’est la ligue qui va être capable de se tenir jusqu’à ce que la détermination des joueurs soit affaiblie suffisamment pour leur faire signer un contrat favorable à la ligue.
C'est vrai que les proprios ont l'air de mener la danse mais j'espère qu'ils n'auront pas l'occasion de pousser le bouchon trop loin et de le fixer sur papier.
Je ne sais pas trop où ça en est mais l'idée que j'ai parfois entendu de pouvoir casser n'importe quel contrat une fois par an (comme celui de Joe Johnson ou de Gilbert Arenas) par exemple, est abusé.
De mon côté, je verrais plutôt des légers ajustements au CBA en faisant simplement en sorte de durcir un peu la luxury tax (payer 3 ou 4 dollars de taxe pour chaque dollars dépassant le salary cap au lieu d'un seul actuellement) histoire de rendre le truc plus dissuasif. Assurer une meilleure péréquation entre les franchises aussi.
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