05 juillet 2009

Analyse de la draft 2009: Les Grizzlies de Memphis

-
-
Joueurs draftés :

Hasheem Thabeet (C, junior), choisi en n°2 (profil au 2nd pick, Memphis)
DeMarre Carroll (SF/PF, senior), choisi en n°27
Sam Young (SF/PF, senior), choisi au second tour en n°36 (profil au 16th pick, Chicago)


Défier le sort

---C’est une espèce de malédiction qui chaque année attend tapie dans l’ombre ce moment précis où le nom du second choix de draft est annoncé par David Stern. Certaines histoires racontées au détour d’un repas de fête soudainement silencieux l’évoquent du bout des lèvres, relatent quelques uns de ses actes mais elle reste toujours à la lisière des pensées, même chez ceux qui les écoutent. Et pourtant, le recueil de ces contes ébréchés et élimés est suffisamment lourd pour que quelques sens soient maintenus en alerte.

---La sainte année de 2003 vit Detroit sélectionner candidement Darko Milicic derrière LeBron James, indéboulonnable n°1 de draft, et devant Carmelo Anthony, Dywane Wade, Chris Bosh ou encore Chris Kaman. Un an auparavant, le fabuleux meneur de Duke, Jay Williams prenait place à cette même position et connaissait une saison rookie difficile avant de voir sa carrière se briser par un accident de moto. Cette damnation a longtemps poursuivi Chicago, repoussant la mythique franchise à terre à chaque fois qu’elle essayait de se relever. En 2001, exactement un an avant l’épisode Jay Williams, les Bulls échangèrent leur franchise player Elton Brand contre le deuxième choix détenu par les Clippers et les droits sur un jeune lycéen au potentiel inimaginable, Tyson Chandler. Celui-ci ne brillera jamais dans la cité venteuse et ce ne sera que lorsqu’il portera les couleurs de New Orleans qu’il deviendra pendant un temps un solide titulaire. Leur dernière empoignade avec le phénomène marque encore aujourd’hui le quotidien de la franchise au taureau écarlate. Il y a trois ans, Chicago atterrissait une nouvelle fois juste derrière le first pick et choisissait le fabuleux LaMarcus Aldridge…juste avant de l’envoyer à Portland contre Tyrus Thomas. Certains croient encore au potentiel de l’ailier chicagoan, mais leur nombre s’effiloche à chaque fois qu’un match des Bulls prend fin.

---La liste des victimes ne s’arrêtent pas là. Un regard même furtif sur celle-ci est toujours dur à supporter. Marvin Williams en 2005 choisi par Atlanta devant Deron Williams et Chris Paul, Keith Van Horn en 1997 par New Jersey via un trade, Shawn Bradley et ses 2,29 mètres par Philadelphie en 1993, Danny Ferry considéré un temps comme le nouveau Larry Bird et choisi par les Clippers de Los Angeles en 1989. Et que dire de Len Bias (1986), mort deux jours après avoir été sélectionné par les Celtics du même Bird alors qu’on attendait de lui qu’il maintienne la légendaire mais vieillissante équipe dans les hauteurs de la ligue...et qu’il s’oppose au jeune Michael Jordan.

---Peut-être est-ce le spectre du plus célèbre des second choix, Sam Bowie, sélectionné en 1984 après Hakeem Olajuwon et avant Michael Jordan, qui tente de rendre sa légende un peu moins lourde à porter en soufflant son tourment empoisonné sur un autre n°2 de draft avec l’espoir que celui-ci connaisse une histoire suffisamment spectaculaire pour effacer la sienne des tablettes de l’Histoire ? Que dire de cette statistique issu d’un article de nbadraft.net, sinon que la logique est devenue une notion ésotérique ?

No. 1: 16.5 points, 7.5 rebounds, 2.7 assists
No. 2: 13.2 points, 5.7 rebounds, 2.9 assists
No. 3: 15.9 points, 5.3 rebounds, 3.4 assists
No. 4: 14.4 points, 5.8 rebounds, 3.2 assists
No. 5: 14.7 points, 5.1 rebounds, 2.8 assists

[statistiques sur les vingt dernières draft]

---Comment appréhender ces chiffres dénués de sens? Même si les erreurs de castings sont finalement assez fréquentes, elles peuvent intervenir sur l’ensemble du top 5. Et puis, il y aurait une certaine logique à voir des chiffres si bas pour le n°4 ou 5, mais pour le n°2 ? Comment se fait-il que lorsqu’il s’agit de choisir un joueur parmi tous sauf un (le premier choix), on se retrouve avec des individus qui sont en moyenne sensiblement moins productif que ceux qui sont sélectionnés après eux ?

---Les Grizzlies, courageux détenteur du second choix cette année ont déjà affronté cette damnation plusieurs fois depuis le début de leurs courtes existences. Leur première rencontre avec cette aura corrompue les a pris par surprise. En 1998, les Clippers, premiers à se décider, laisse filer Mike Bibby pour acquérir le pivot Michael Olowokandi. Fort de leur chance la franchise alors installée à Vancouver ne tergiverse pas et sélectionne le meneur d’Arizona. Hélas, celui-ci ne concrétisera pas les énormes attentes qu’il avait suscité avant plusieurs années. Et sous les couleurs des Kings de Sacramento.

---En 1999, les Grizzlies reçoivent à nouveau le second choix de draft. Le résultat n’en sera que plus douloureux. La franchise sélectionne la star NCAA, Steve Francis. Mais celui-ci refuse de s’imaginer avec le maillot canadien et force les dirigeants à monter un transfert qui l’enverra à Houston contre Michael Dickerson, Othella Harrington, Antoine Carr et Brent Price. Steve Francis deviendra le co-Rookie MVP avant de succomber à son tour à la malédiction et traîner péniblement la suite de sa carrière sur les bancs de différentes franchises.

---Un an après, le destin s’amuse encore de la franchise en lui offrant le privilège de choisir en second pour la troisième fois consécutives. Dans l’une des draft les plus faibles de l’Histoire, les Grizzlies sélectionneront Stromile Swift. Celui-ci n’a à ce jour jamais dépassé 12 points de moyenne.

---2009, les Grizzlies désormais installé à Memphis n’ont pas décollé du fond du tableau. Mais ils se présentent aujourd’hui avec l’ambition qui sue de leurs regards vengeurs, portés qu’ils sont par OJ Mayo, Rudy Gay et Marc Gasol, et ne baisse plus les yeux face aux autres franchises (Portland ne le sait que trop bien depuis l’incident Darius Miles). Sauf, qu’ils devront une nouvelle fois braver la malédiction et maîtriser ce nouveau second choix lequel s’inscrit, comme par hasard est-on tenter de dire, dans une draft jugée de moindre calibre mais surtout incroyablement imprévisible. Et cette fois, la franchise de Memphis a décidé de se jeter dans la gueule du loup pour frapper l’animal de l’intérieur : elle a choisi Hasheem Thabeet, le joueur dont l’avenir en NBA est le plus incertain mais aussi celui qui pourrait apporter le plus grand bénéfice à son équipe.

7 commentaires:

Patrice a dit…

Zach Randolph avec Mayo et Gay + Gasol qui est meilleur en attaque que en défense si je ne m'abuse, ça fait pas trop de scoreurs tout ça?

il a vraiment intérêt de savoir défendre le thabeet sinon ya vraiment plus personne...

Patrice a dit…

apparement les Grizzlies sont aussi sur Iverson, ça ferait vraiment beaucoup là! Non?

je vois pas pourquoi ils vont chercher Iverson alors que Conley a fait une bonne fin de saison et serait surement capable de mener cette équipe

StillBallin a dit…

(j'ai vu ton commentaire sur la deuxième partie mais comme tu le reprends dans la première, je ne répond qu'ici)


Trois forts scoreurs (en l'occurrence Mayo, Gay et Randolph) sur cinq, c'est à peu près le quota parfait (les fameux Big Three). Même si aucun des trois n'est vraiment très altruiste, ça peut fonctionner parce que Randolph ne marche pas vraiment sur les terres des deux autres (un peu plus près du cercle). Et puis ce qui est bien avec un intérieur scoreur, c'est qu'il ne monopolise pas le ballon comme le font les arrières comme Gay ou Mayo. Randolph cherche à scorer dès qu'il a la balle mais il suffit de ne lui filer le cuir que de temps en temps pour assurer le partage des tickets shoot. La situation était peut-être plus problématique aux Clippers avec Baron Davis, Al Thornton et Eric Gordon, pourtant l'ancien jailblazer a fait son boulot sans causer de problèmes de partage de ballons (du moins pas en ce qui le concerne).
Donc, je ne pense pas que le trio de scoreurs Mayo-Gay-Randolph soit problématique. D'ailleurs, à Washington, Arenas, Jamison et Butler ne sont pas vraiment du genre à réfléchir avant d'essayer de scorer et pourtant ça ne marchait pas trop mal avant que le genou de l'agent zero ne fasse hara-kiri à son équipe (après, c'est sûr que c'est pas kiffant comme jeu).
Je ne dis pas que le trio va cartonner (on ne sait jamais, surtout avec un cas comme Randolph) mais je pense que les trois peuvent évoluer ensemble, surtout si les deux autres joueurs du starting five sont un meneur pas super efficace au scoring et appliqué à faire jouer les autres (Mike Conley) et un pivot quasi exclusivement défensif (Thabeet). Mais bon tant que la saison n'a pas débuté, c'est de la théorie.
Par contre, on peut s'inquiéter d'autres choses comme de l'influence potentiellement néfaste que pourrait avoir Randolph sur cette équipe encore jeune et impressionnable, ou encore du risque de voir la présence de l'intérieur au gros fessier freiner le développement des jeunes intérieurs comme Darrell Arthur voire même Marc Gasol par manque de minutes et de responsabilités (un peu gênant quand on est au début d'une phase de reconstruction). on peut aussi penser à des éventuels problèmes défensifs à venir comme tu le soulignes.
Voilà, Randolph devrait équilibrer l'attaque Grizzly un peu trop portée sur l'extérieur (because Mayo et Gay) mais il constitue une solution à risque (ben c'est Zach Randolph quoi) et à court terme (il a 29 ans je crois). Donc dans l'immédiat, ce n'est pas forcément une mauvaise acquisition (j'affirme ça avec des pincettes quand même) mais dans l'optique d'une reconstruction ce trade est peut-être pas très pertinent. En plus ça rend service à un cancre rival (les Clippers vont pouvoir lâcher leur bestial n°1 de draft sur le terrain sans être encombré du gros et talentueux Zach).

StillBallin a dit…

(mon commentaire est trop long pour être poster en une fois)

Par contre, je l'arrivée d'Iverson pourrait provoquer une grave crise de tickets shoots. Mais pas que. Iverson partage un peu le même profil que Mayo (combo-guard très fort scoreur qui tient beaucoup le ballon, même si Mayo est plus grand) et j'ai du mal à imaginer les deux joueurs coexister sans qu'ils ne se marchent sur les pieds. Ensuite, 4 scoreurs avides de ballons et peu portés sur le jeu d'équipe, c'est une équation qui a peu de chance de marcher. On peut aussi penser que ce n'est pas avec Iverson que les Grizzlies vont enfin pouvoir se doter d'un vrai fond de jeu (lequel permet en principe d'exploiter au maximum les forces d'une équipe en les organisant), surtout si The Answer prend la place du gentil Conley.
Enfin, comme dans le cas Randolph, j'ai du mal à voir l'intérêt de faire venir le plus tout jeune Iverson quand on entame une phase de reconstruction, surtout que ce move pourrait entraver celle-ci.
Je pense que la principale raison de l'intérêt des Grizz pour Iverson réside dans leur volonté de rendre la franchise plus sexy, qu'elle marque un peu plus les esprits et qu'accessoirement qu'elle vende plus de billets. Cette "névrose" liée au manque d'exposition peut se comprendre. Combien de joueurs mémorables ont-ils un jour porter les couleurs de Vancouver/Memphis? On pourrait penser à Pau Gasol mais celui-ci n'a jamais vraiment rempli d'images la tête des fans lorsqu'il était dans cette équipe. Ce que je veux dire c'est que la franchise n'a jamais connu de période qui marque les esprits et que ça doit leur manquer un peu. D'où le désir de s'attacher une légende comme Iverson.
Bon là je ne fais que des suppositions, elles ne sont peut-être pas valables. En tous cas, il est pas bon de supporter cette équipe (il y aura bien un fan qui fomentera un coup d'Etat contre les dirigeants Grizz, non?)

Patrice a dit…

belle analyse, merci

DAR8 a dit…

AI à Memphis, c'est fait ! Comme StillBallin, je pense que c'est surtout une question de renflouer les caisses d'un point de vue merchandising + billetterie qu'une réélle stratégie basketballistique...

StillBallin a dit…

On a un peu l'impression qu'il s'agit d'une solution par défaut pour Iverson et d'une opportunité à saisir pour les Grizz (AI n'a signé que pour un $3 millions sur 1 an) et qu'ils pourront profiter de retombés médiatiques et financières, quitte à sacrifier le sportif (qui de toute façon était déjà mauvais).

Le seul point intéressant que je trouve dans cette signature (au delà du fait que ça permet d'éviter de voir Iverson passer la saison sans club, ce qui est franchement triste même s'il ne peut s'en prendre qu'à lui-même), c'est qu'OJ Mayo risque d'être replacer en meneur et que je suis curieux de voir ce qu'il peut faire à ce poste. Son potentiel à ce poste est énorme: entre sa fabuleuse capacité à scorer, son physique hors norme pour cette position (il est notamment plus puissant que la plupart des meneurs de la ligue), sa créativité et sa vision de jeu, il ne lui manque que la volonté de servir les autres pour être véritablement dominateur à ce poste.

Ironiquement, la présence d'Iverson obligera peut-être OJ Mayo à devenir l'énorme meneur qu'AI n'a jamais pu être.