[suite de la première partie]
---D’ailleurs, comme s’il était devenu le nouveau héros du film « Un jour sans fin », Jennings semble avoir la saison passée à ses trousses. Il quitte le tyrannique coach romain, Jasmin Repesa pour son équivalent américain, Scott Skiles et fausse compagnie à l’importante concurrence de l’équipe italienne au poste 1 (Sani Becirovic et Ibrahim Jaaber) pour en retrouver une autre tout aussi dense à Milwaukee (Luke Ridnour et peut-être Ramon Sessions). Le jeune meneur pourrait même regretter d’avoir à troquer le maillot de la Roma pour celui des Bucks. Bienvenue dans ce monde.
---Et bien qu’il en soit ainsi, l’ancien bench player des joutes européennes repartira une nouvelle fois au combat pour prendre ce qui lui est dû. Le Bradley Center de Milwaukee sera son champ de bataille et finalement, il correspond plutôt bien à un Brandon Jennings en treillis. Scott Skiles est dur, intransigeant, parfois de manière déraisonnable mais le rookie a déjà connu ça. Toute l’année, il a senti l’haleine de plomb de Jasmin Repesa sur sa nuque et a pu être un témoin privilégié de la géniale folie qui habite certains grands coachs du Vieux Continent comme le légendaire Zeiljko Obradovic (Panathinaïkos). A côté, Skiles est un ramasseur de balle. De plus, le coach de Milwaukee et Jennings possèdent des expériences semblables (comme le nouveau rookie des Bucks, Skiles est un meneur et il a connu plusieurs années Europe en tant que joueur mais aussi en tant qu’entraîneur) et ont des repères en commun, ce qui pourraient leur permettre de se comprendre et de tisser une relation efficace.
---Entre l’exaltation qu’il a créée au lycée, l’énorme médiatisation que sa décision de partir en Europe a provoquée et les propos qu’il a tenus, Brandon Jennings devra traîner quelques kilos de pression supplémentaires à ses chevilles. Et alors ? Jennings a dû vivre avec un président de club qui se lamentait d’avoir abandonner des millions d’euros pour un adolescent américain qui ne dépasse pas dix points de moyenne, poser le pied sur des terrains en sachant qu’il retournerait sur le banc à la moindre gaffe et supporter les attentes puis la déception de ses compatriotes d’outre-Atlantique. Rien ne dit qu’il surmontera cette pression, mais on sait qu’il la regardera dans les yeux et qu’il n’hésitera pas avant de plonger dans la boue.
---Et puis dans cette équipe, il aura la chance de pouvoir montrer ce qu’il a appris en Europe (si il a appris quelque chose) et ainsi, prouver que sa décision de traverser l’Atlantique à sa sortie du lycée n’était pas une erreur, fruit de l’arrogance et de la cupidité. En effet, les Bucks ont malgré tout un effectif bien en place et plutôt solide, à défaut d’être excitant, avec un socle de qualité composé du super shooteur, Michael Redd, et du pivot à l’ancienne, Andrew Bogut. Les meneurs qui conduiront cette équipe -dont Jennings-, auront principalement pour devoir de faire la fonctionner efficacement en contrôlant le jeu et en distribuant judicieusement les ballons.
---Or, c’est exactement cette maîtrise et cette gestion du jeu qu’on espère que le meneur américain a pu acquérir du côté du basket plus réfléchi et précis qui marque le continent européen. D’ailleurs, cette supposée progression outre-Atlantique aurait réglé pas mal de défauts qu’on lui reprochait au lycée et qui contrebalançait les fabuleuses qualités qui avaient amené son nom sur toutes les lèvres avant même qu’il ne décide de troquer la case université pour l’Euroleague.
---Mieux encore, avec son talent, sa vitesse et cette « dimension européenne », Jennings sera peut-être l’étincelle qui illuminera le jeu des Bucks et celui de Michael Redd, Andrew Bogut et des powers/combo forwards athlétiques Amir Johnson, Joe Alexander, Hakim Warrick et Luc Mbah a Moute. Des joueurs qui ont besoin d’être bien servis pour être efficace. Dans leur configuration actuelle, les Bucks semblent offrir au point guard rookie un terrain propice au joueur qu’il est censé être devenu. S’il démontre effectivement un jeu de cette envergure (et dans ce sens, la summer league a été très encourageante), Jennings aura repris la place de prospect n°1 qu’on lui avait retiré après ses balbutiements italiens, jusqu’à faire paraître sa sélection en dixième position de la draft 2009 aussi incongrue que celle de Paul Pierce.
---Lâché dans un trou perdu de l’Amérique dépourvu de la moindre source de distraction un peu excitante, le cœur chargé d’un sentiment de revanche qui lui bat ses tempes à chaque pulsation, Jennings devrait être dans les conditions psychiques optimales pour devenir le joueur que son potentiel lui promet. Le bonhomme est en mission, bien décidé à faire naître des regrets à chacun des matchs qu’il disputera.
---En sélectionnant le paria de la draft, Milwaukee a peut-être relancé la franchise. Brandon Jennings est clairement le genre de joueur qu’on peut imaginer être un jour un all-star et son expérience européenne a pu, malgré ce qu’en dit la chute de sa côte, faire de lui quelqu’un d’une valeur particulière. En effet, on peut supposer sans prendre trop de risques que cette difficile année italienne lui a permis de s’endurcir mentalement et de gagner en humilité.
---Mais mieux encore, il se pourrait que ce séjour sur ce continent où chaque panier doit se mériter et où chaque possession est importante, lui a permis d’avoir une approche différente du jeu, plus globale et plus réfléchi, avec l’efficacité comme aiguilleur plutôt que l’exploit. Son talent pur et ses qualités intrinsèques catalysés par ce genre de compréhension du jeu que Chauncey Billups a mis cinq ou six ans à développer, installeraient Jennings dans le cercle des meneurs de très haut niveau pour la décennie à venir, et son équipe avec. Avec un dixième choix et le lycéen rebelle encore disponible, les Bucks avaient beaucoup moins à perdre qu’à gagner.
---D’ailleurs, avec un effectif solide mais sans génie, Milwaukee ne pouvait pas espérer mieux. La franchise du Wisconsin aurait eu besoin d’un gros talent pour espérer monter sérieusement en grade, ce qui est en principe difficilement possible avec un choix de draft aussi éloigné des premières places. Certes, il faudra être un petit peu patient avant de voir cette équipe décoller sous les doigts de Jennings mais le jeu en vaut la chandelle.
---Et puis les Bucks ont peut-être aussi fait un second bon coup. Jodie Meeks (1,92 m, né en 1987) qu’ils ont sélectionné avec leur choix du deuxième tour, ne sait faire qu’une seule chose mais il le fait tellement bien qu’il devrait trouver sa place dans n’importe quel boîte à outils de la NBA. Meeks est un shooteur hors norme. Auteur de 23,7 pts par matchs à 46,3 % de réussite aux tirs dont 40,6 % à trois points (8 tentés en moyenne), il s’est un offert un petit séjour dans la postérité en battant cette année le record de points inscrit sur une rencontre pour un joueur de la prestigieuse université de Kentucky (Rajon Rondo, Tayshaun Prince, Antoine Walker, Jamal Mashburn, Pat Riley) avec 54 pions.
---Cette boule de muscle accuse un manque de centimètres et des limites dans la plupart des autres domaines, mais c’est une véritable machine à shooter qui n’hésitera pas à artiller à la seconde où le ballon viendra se poser dans ses mains et qu’il aura un petit pécule de liberté pour armer son bras de haute précision. Le garçon est plutôt efficace et il pourra sortir du banc pour calmer les ardeurs adverses ou enfoncer le clou. Un tel shooteur peut faire des ravages dans n’importe quel équipe mais plus encore lorsque celle-ci dispose d’un, espérons-le, futur excellent meneur (Jennings) et d’un pivot dangereux à proximité de cercle et bon passeur (Bogut). Comme le point guard drafté en n°10, Meeks a répondu au-delà des attentes pendant la summer league (une alchimie s’est-elle créée entre ces deux joueurs ?) et Milwaukee pourra compter sur lui pour allumer quelques mèches dans le dos de Michael Redd.
---La franchise de Milwaukee a avancé quelques pions sur le grand échiquier de la NBA et il se pourrait que ce soit ceux-là qui décident un jour ou l’autre du sort de la partie. Et puis, peut-être que Jennings pourra donner quelques reflets hollywoodiens au Wisconsin. Faire des Bucks une franchise attractive et une équipe de premier plan, ça ferait une note de bas de page plutôt seyante à l’histoire du premier lycéen à avoir troqué le championnat universitaire par l’Euroleague.
StillBallin
6 commentaires:
Je connais tres bien Milwaukee et sa region (j'y suis d'ailleurs en ce moment, c'est pourquoi je n'utilise pas d'accents), et ca m'enerve toujours quand je lis les articles de journalistes ou bloggeurs francais decrivant cette region comme la pire qui soit, alors qu'ils n'y ont jamais mit un pied...Certes ce n'est pas la californie avec ses strass et ses paillettes, et Milwaukee n'est pas LA, mais c'est une region tres jolie, et tres agreable l'ete (il fait 30 degres en ce moment).
Enfin voila la parenthese tourisme refermee, mais je ne trouve pas juste de depressier autant les bucks, car un 5 Jennings-Session-Redd-Warrick-Bogut, excusez moi, mais y a pire...
Tu as raison de défendre ta région. Les bretons le font, alors pourquoi pas les "Milwaukistes"?
Par contre, le 5 des Bucks que tu donnes pourrait effectivement être bon... offensivement, parce qu'avec une défense comme celle là, c'est encore pire que les Warriors sous Nelson.
Jennings, Sessions, Redd et Warrick, ça serait beaucoup trop petit ni assez puissant ou tonique pour avoir un impact en défense.
Surtout qu'avec Scott Skiles, difficile d'imaginer une équipe "all offense" et porte ouverte en def.
Cela dit, vive les coins tranquilles et la campagne...
Justement Thomas, il est plus question de perception que de réalité. La perception de Jennings, de l'entourage du jeune homme et du monde du basket en général. Milwaukee est peut-être une ville coquette (là dessus je te crois sur parole) mais ce n'est pas un lieu vraiment attractif et médiatique comme New York, Los Angeles ou encore Chicago, où chaque action prend une ampleur considérable.
Pour quelqu'un comme Jennings qui a une personnalité de showman et qui est sous le feu des projecteurs depuis le lycée, le Wisconsin n'apparaît pas comme un lieu propice à ses aspirations de star.
Evidemment, c'est à la fois la ville et la franchise qui provoque ce désamour.
D'ailleurs, ce n'est pas sans raison que Yi Jianlian a tout fait, en vain, pour éviter de porter le maillots des Bucks bien que ces derniers l'aient drafté. Les diffusions télés sont aussi un bon moyen de mesurer le potentiel d'attraction des franchises et on ne peut pas dire que Milwaukee soit gâté à ce niveau-là.
Si un joueur veut faire parler de lui et à soif de reconnaissance, Milwaukee n'est pas le meilleur endroit pour ça. Et c'est de ça dont je parle dans cet article.
Sinon, au niveau de la team elle-même, je trouve que tu exagères un peu mes paroles. Dans l'article, je qualifie l'effectif des Bucks de solide et auquel il suffirait d'une étincelle pour passer la vitesse supérieure (étincelle qui, j'espère, pourra être Jennings). D'ailleurs, j'ai plutôt un bon sentiment pour cette franchise depuis que Skiles y a déposé ses valises (http://unlimitednba.blogspot.com/2008/05/special-guest-stillballin-prsente-aprs.html).
Cette année, si les leaders ne passent pas trop de temps à se faire soigner, il ne serait pas étonnant de voir cette équipe lutter pour une place en play-offs.
le problème c'est que Redd il fait jamais une année entière
l'an dernier Ridnour/redd/jefferson/moute/bogut c'etait pas trop mal, mais ils se sont tous blessés les uns après les autres...
surtout que Redd bien chaud ça peut faire du 30pts par matchs
Session risque de partir à NY cette année apparement
si Redd se blesse (ce dont je suis persuadé, comme T-mac qui va replonger à tous les coups, ces gars ils devraient arrêter dès maintenant au lieu de s'acharner non?) yaura un manque de scoring en plus de la défense merdique
enfin je veux bien y croire mais à mon avis il faudra encore patienter un peu...
J'aurais moi aussi bien aimé voir ce que ça aurait donné avec Redd mais aussi Bogut pas blessé.
D'ailleurs je me demande si il ne vaudrait pas mieux échanger Redd contre un ou des joueurs plus jeunes vu que Milwaukee est en pleine reconstruction. Autant jouer l'avenir jusqu'au bout et profiter de la fleur de l'âge de Redd.
J'espère aussi que Joe Alexander va enfin jouer comme un n°8 de draft.
Du coup, c'est vrai qu'entre Jennings, Alexander et les blessures, ça fait beaucoup de questions pour une équipe.
Moi non plus je comprends pas le dessous des cartes... Franchise glamour, petit et grand marché... Cleveland, Detroit, New Jersey, Atlanta, Charlotte, Washington (pas glamour du tout^^), Indiana, Oklahoma, Portland (il pleut 200 jours dans l'année^^), Denver, Memphis, New Orleans post Katrina, Salt Lake City...
C'est pas ce qu'il manque les franchises à ranger "mornes", "petit marché" en NBA...
Par contre, je rejoins StillBallin', les américains ne voient quasiment que les matchs sur les chaines nationales (en plus des matchs de la "region") et tout transite par Sport Center... Donc là oui Jennings pourrait avoir un manque de reconnaissance de ce côté là.
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