Bon ok, ce n'est pas vraiment exclusif, ce n'est que la retrancription traduite de l'interview de Sloggi Jr avec le journaliste du magazine Slam (dans sa version en ligne), Lang Whitaker.
Il revient sur sa première saison en NBA, sur son enfance nudiste particulière et partagée entre un père tennisman, zoukeur, gourou athlétique & mental ainsi que célébrité préférée des français désormais déserteur et une mère artiste sculpteuse & ancien mannequin. Il relate également son passage dans les colonnes faits divers de la presse mondiale et sur les leçons qu'il en a tiré.
SLAM : Tu as l’air plus costaud que l’an dernier. Tu as pris du muscle ?
NOAH : Ouep, un peu. Mais il y a encore du chemin à faire. On a deux mois avant l’engouement des fans pour la saison. Je pense que j’ai eu une trêve super en terme de prendre du bon temps avec les voyages et les visites familiales. Enfin, j’ai tout de même bossé, mais je pense que dans les deux prochains mois je vais rentrer dans ma propre routine, me focaliser sur ce que je dois faire pour être prêt pour la saison. On a l’opportunité de faire quelque chose de très bon, c’est donc important de tous débuter dans la meilleure forme physique que possible.
SLAM : Tu as dit que tu as eu une trêve géniale. Certains pourraient ne pas être d’accord avec cela. David Stern ne serait pas d’accord. (L'Affaire NOAH)
NOAH : David Stern ne serait clairement pas d’accord. Mais… qu’est ce que je peux dire ? Je pense que tout arrive pour une raison. C’est plutôt un avertissement qui m’a ouvert les yeux. Mais je ne le regrette pas. J’ai définitivement appris de cette épreuve, mais je ne la regrette pas. Je pense que ça va m’aider sur le long terme. Apprendre de ses erreurs. Toujours apprendre de ses expériences. C’était humiliant. Quand tu joues en NBA et que tu entends « ta-ta-ta, ta-ta-ta » (il chantonne le Jingle d’ESPN), tu sais que tout le monde va savoir ce que tu as fait. Il faut donc juste faire attention. Mais c’était juste deux jours de cet été. Actuellement, tout ce qui importe est le basket et de gagner quelques matchs. Voilà tout ce qui compte en ce moment.
SLAM : J’étais surpris de ton arrestation. Tu as grandi dans un environnement de folie à NY City, qui force d’une certaine manière à mûrir plus vite, et tu as connu beaucoup de choses à Florida, également. J’étais juste surpris parce qu’il me semblait que tu étais plus au courant de comment marchent les choses que la plupart des joueurs qui entrent en NBA.
NOAH : Je ne veux pas dire que les gens essaient de te coincer, mais d’une certaine façon tu es une cible. Particulièrement quand tu es dans une petite ville comme Gainesville. Mon amour pour Gainesville est démesuré. Les gens m’ont demandé, vas-tu revenir à Gainesville ? En particulier des gens de Gainesville ou des fans des Gators, et bien sûr que je reviendrais. J’aime cet endroit. Vous pensez qu’à cause d’un petit incident je ne voudrais plus venir à Gainesville ? Est-ce que je pense que j’ai été harcelé ? Oui, mais ça n’a pas d’importance. En même temps j’ai fait une erreur. Je ne vais pas me plaindre ou chercher des excuses. C’est arrivé et le plus embêtant est que ça risque de me porter préjudice sur le long terme parce que je voulais faire des trucs avec les enfants et que je n’ai pas pu à cause de cette image, de cette bonne conduite à avoir tellement importante pour la NBA. Et c’est compréhensible, il y a beaucoup d’argent en jeu et leur image compte beaucoup pour eux ; il faut respecter ça. Je suis juste un petit poisson dans un putain de grand étang.
SLAM : Et David Stern est Poseidon.
NOAH : Carrément. Si je ne devais retenir qu’une chose, qui m’a surprise, c’est la vitesse à laquelle l’affaire s’est propagée dans les médias. Ouvrir une cannette de bière et se faire un demi joint de Marijuana et, direct, ça fait le tour du monde. Des gens m’appelaient de partout, du genre : tu es dans mes prières… Je me disais : Wow, c’est fou. Et tout ça à cause d’une chose : « ta-ta-ta, ta-ta-ta ». C’était partout ! Deux semaines plus tard je suis allé en France et c’était la folie.
SLAM : Mais vous êtes sur une si grosse scène que…
NOAH : Et bien ça fait partie du processus d’apprentissage pour moi. Il faut faire attention. Je connais peu de gens qui se sont fait arrêter. Ce n’est pas comme si je descendais la rue avec un joint et une binouze dans les mains tout en criant et parlant fort. Mais j’ai baissé ma garde un instant et ce qui est arrivé, arriva. Donc j’ai appris que l’on doit juste faire attention et je me dis que ça aurait pu être pire. On m’a juste fait une petite tape sur les mains et tout le monde le sait. C’est désormais à mon tour d’apprendre de mes erreurs. Tout le monde fait des erreurs, je suis sur que tu as fait pire.
SLAM : Ben tout le monde se fiche des erreurs que je puisse faire. Le truc est que beaucoup de personnes font gaffe aux tiennes. Quelques personnes font gaffe aux miennes, mais des millions aux tiennes.
NOAH : La NBA est tellement énorme, mais en même temps il faut maintenir son image. Je me rappelle de ma jeunesse, regardant les joueurs NBA, et c’est à peu près la même chose. Même si ce n’est pas juste d’être constamment sous les feux des projecteurs, de voir que les gens vont écrire un truc si tu vas en boîte, il a été vu ici en train de faire ci & ça… c’est marrant pour personne. Mais en même temps, c’est juste le revers de la médaille. Les avantages et les inconvénients. Je ne changerais ça pour rien au monde.
SLAM : Tu suivais qui quand tu étais enfant ? Quel joueur ?
NOAH : J’étais un fan des Knicks. Charles Oakley, Patrick Ewing, Greg Anthony — toute la bande. Anthony Mason, Derek Harper, John Starks — l’équipe était crasseuse, dure au mal, pas de lay-ups offerts. C’était l’ère Riley. Mais même après, avec les Larry Johnson, etc. J’étais juste un énorme fan des Knicks.
SLAM : Est-ce que tu respectais ton père en tant qu’athlète, ou est-ce que tu le voyais juste comme ton père ?
NOAH : Je pense que j’ai toujours été influencé par mon père, mais c’était plus dans mon subconscient. C’était toujours mon père mais en même temps, quand je grandissais, je le voyais partir courir ou s’entraîner. Même s’il sortait, il était toujours strict dans sa préparation physique. Il m’a appris à aller courir, de temps en temps, avant les cours. Je veux dire, qui va faire un footing au lycée ? Personne. Je me rappelle que je restais parfois dans son appart de NY et qu’il me réveillait tôt pour partir courir à peu près 5 kilomètres dans Central Park et faire des pompes avant l’école. Je savais que personne à l’école n’avait jamais fait ça. Je me demande combien de jeunes font ça en ville ? Je sais que Sebastian Telfair le faisait et il est en NBA… Mais combien d’enfants font vraiment ça, de la préparation physique avant d’aller en cours ? J’ai clairement appris ça de mon père. Et pourtant, le cadre de vie de mon enfance n’était pas propice à se faire mal.
SLAM : C’est presque être né avec une cuillère d'argent dans la bouche.
NOAH : C’est exactement ça. Mais chez ma mère ce n’est pas comme ça. Et j’ai vraiment grandi avec elle, dans le quartier de Manhattan Hell’s Kitchen. Mes parents ont divorcé quand j’étais très jeune. C’était un endroit agréable, mais il y avait toujours une différence dans notre train de vie quand ma sœur et moi allions vivre chez mon père comparé à celui chez ma mère. C’était une bonne chose parce que ça nous apprend à relativiser les choses. Je savais qu’il y avait une différence claire entre vivre avec mon père ou ma mère et je pense que ça m’a aidé. L’été, je vivais avec Mr Tyrone Green (son mentor & formateur) qui était comme mon coach particulier. Il m’a emmené dans les « projects » et c’était la première fois que je voyais la pauvreté dans NY et des trucs du genre. Et je ne connaissais rien à la culture Basket, j’étais un enfant français. Je suis aujourd’hui fier de venir des quartiers les plus bourgeois & friqués de France et d’avoir grandi dans un tel cadre mais aussi également de pouvoir aller en ville à Dyckman et d’être respecté. Peu de jeunes peuvent en dire autant, tu sais ?
SLAM: Comment tu t’es retrouvé à vivre chez Mr.Green ?
NOAH : Il travaillait à quelques pâtés de maisons de là où j’habitais, dans Hell’s Kitchen. J’allais là bas tous les jours pour jouer au basket et m’entraîner. Ma mère et ma sœur partaient toujours en France et il m’a dit : tu ne peux pas partir comme ça. L’été est la période où les basketteurs deviennent meilleurs. Il m’a dit que je devais faire des sacrifices ; je suis donc resté avec lui et je suis devenu plus fort, plus dur, j’ai travaillé.
SLAM : Quand as-tu décidé que le basket serait ton sport ?
NOAH : J’ai toujours aimé le basketball.
SLAM : Est-ce que c’était important en France quand tu étais jeune ?
NOAH : Suffisamment. Je suis allé dans une école américaine, et ma grand-mère paternelle jouait dans l’équipe nationale du Cameroun. C’était la seule dame blanche de l’équipe camerounaise. J’ai commencé à jouer vers 8, 9 ans. L’école commençait à 9 heures mais j’y allais à 8 heures pour jouer avec le prof de sport. Ensuite j’ai rejoins un club du coin et j’ai commencé à jouer tout le temps.
SLAM : Dans quel quartier de Paris tu as grandi ?
NOAH : Dans une petite ville juste à l’extérieur de Paris. C’était simplement…, enfin je veux dire que les gens parlent des personnes friquées et bourgeoises ici (NY) mais ils ne comprennent pas ce qu’est être un bourgeois. Le mot US « Bougie » utilisé vient du français bourgeois, et j’ai vécu tout ça. Ma mère était une artiste très ouverte d’esprit ; ma sœur et moi gambadions tout le temps tout nus quand nous étions enfants, vers 2, 3 ans. Dans le monde du tennis on était comme des animaux incontrôlables. Mais ils ne disaient rien parce que mon père était dans les parages et que ça ne le faisait pas de faire une remarque. Il était déjà le seul mec noir dans le milieu et avait des Dreads, etc. & tout le monde l’adorait. Tout le monde savait qui il était.
SLAM : Il est encore adulé là bas, non ?
NOAH : L’amour qu’il reçoit est probablement encore plus fou aujourd’hui. Il n’y a jamais eu de joueur français à gagner Roland Garros depuis lui. C’est un noir/blanc avec des dreads et le seul français à l’avoir remporté en 80 ans ; et maintenant il cartonne dans sa passion musicale — c’est l’artiste numéro 1 en France. Tu rajoutes à cela le tennis, puis 2 Coupes Davis en tant que coach, et enfin tu casses tout dans le music business ? L’amour qu’il reçoit est juste inqualifiable…
C’est pour ça qu’il retourne vivre ici (USA), c’est juste trop là bas.
SLAM : C’est un bon problème à avoir.
NOAH : Ouep, c’est ce que je lui dit et ce qu’il me dit également, d’ailleurs.
SLAM : Maintenant que ta saison de rookie est terminée et en prenant du recul, est-ce que c’était proche de ce que à quoi tu t’attendais ?
NOAH : C’était une expérience folle. J’ai traversé tant de choses en une seule saison. Les coaches, les échanges, les gens virés, ma suspension de l’équipe. Et quand on évolue dans un gros marché comme celui de Chicago, quand les choses ne vont pas bien…
Je n’ai jamais été aussi exposé aux médias.
SLAM : Même quand toi et ta troupe aviez gagné les titres NCAA à Florida ?
NOAH : Enfin c’était similaire mais ça ne durait que 2, 3 jours. Ca représente une semaine dans ta vie. Et en université tu ne te fais pas descendre de la sorte. Chez les pros, quand tu n’assures pas…
Tu joues pour la ville et à Chicago les gens ont des attentes énormes. Et c’est une bonne chose. C’est supposé être ainsi. T’imagines, 10 ans en arrière ils collectionnaient les bagues de champion. Mais tout roule, j’ai l’impression d’avoir vécu beaucoup de choses et ça va me servir.
SLAM : As-tu senti une progression dans ton jeu au cours de l’année ?
NOAH : Ouep, c’est une histoire de confiance. Je veux dire que je suis passé du stade où je ne jouais pas du tout à celui où je jouais de manière conséquente, genre 30 minutes par match, à la fin. Ce que j’ai appris sur la NBA est que rien n’est jamais acquis. Chaque soir tu joues contre les meilleurs joueurs du monde et tout ce qui importe est d’être à fond tous les soirs. Ton corps est tellement fatigué après le 10ème match que tout est affaire de solidité physique et mentale. Gérer les distractions est aussi la clé.
[L'article original, en VO, ici]
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